Il est des objets insignifiants qui dénotent de toute une philosophie de
Ce qui me frappe, c’est le paradoxe. J’aime le paradoxe. Il me fascine. Il est fascinant comme peut l’être un film d’horreur. Grand paradoxe déjà en soi, le film d’horreur : Il nous fait peur, on le trouve beau et attachant et plutôt que de le fuir on reste scotché, pas par la peur, non, mais par cette tentation terrible de vouloir continuer à se faire peur.
Le paradoxe serait-il dans le plus naturel de l’humain ? A regarder vivre un être humain, il semblerait que oui.
« Avoir », la grande entreprise du genre humain
Dès leur naissance, les humains, alors même qu’ils sont par nature « mortels », les humains sont naturellement éduqués à l’apprentissage d’une grande entreprise : l’acquisition.
Ah ! Acquérir, avoir, posséder, garder !! Voilà le cœur du moteur de nos vies. Non ? Vous n’êtes pas d’accord. Pourtant en y pensant bien, voilà en gros le parcours.
On commence par vouloir avoir l’attention de papa-maman, puis avoir leur amour, le garder, s’emparer de leur confiance, avoir des jouets. Puis dès le premier bain social (crèche, maternelle, école, etc.) avoir des amis, les garder, avoir leur affection, leur temps, avoir la reconnaissance de la maîtresse, avoir des bons points, les collectionner. Encore plus tard, les diplômes, l’argent, la maison, la famille …tous se conjuguent avec l’auxiliaire AVOIR
A quel moment, nous apprend-on ou apprenons-nous, nous à nos enfants, le NON AVOIR ou le renoncement ? Rien, absolument rien (sauf certains « rites » religieux de l’abstinence… et encore, la plupart sous-tendent le principe de « récompense », une autre forme d’avoir) ne nous apprend à renoncer aux choses, aux êtres, à l’acquis, ni même à l’inaccessible. Et pourtant, le renoncement est une épreuve importante contenue dans la vie elle-même…
Et pour finir, juste parce que cette petite philosophie à 3 sous m’est inspirée par la vision d’un œuf à repriser en bois, presque centenaire au moment même où je suis torturée par un horrible mal de dent probablement à extraire, voici, pour le plaisir de se la remémorer, une belle plaisanterie poétique bien connue de Vian, Vian "l’increvable"... sacré Boris! :
La vie, c'est comme une dent
D'abord on y a pas pensé
On s'est contenté de mâcher
Et puis ça se gâte soudain
Ça vous fait mal, et on y tient
Et on la soigne et les soucis
Et pour qu'on soit vraiment guéri
Il faut vous l'arracher, la vie
(Boris Vian – extrait de « Je voudrais pas crever »
-édité en posthume en 1962-)